Germaine Tillion lors de sa mission ethnographique dans l'Aurès 1935-1939 |
Germaine Tillion au cours de sa mission a recueillie
plusieurs version de ce mythe dans le nord du massif auressien : «
Il y avait à Ilfen (ou Guelfen suivant les
dialectes) un douar installé au-dessous
d’un rocher. Là , vivait un homme âgé. Il avait deux filles et l’une d’elles se
nommait Aïcha Tabahloult (La Folle). D’autres disent qu’elle se nommait Aïcha
El Bahloula . Vingt un maghrébin écrivain. Elle lui dit ‘’Ecris à mon amant’’.
Il lui répondit ‘’ Apporte un œuf’’. Elle
l’apporta. Il écrivit sur l’œuf et dit '' De semaine en semaine, surveille-le’’.
Elle s’en retourna chez elle et
surveilla l’œuf .L’œuf s’ouvrit. Il en sorti un serpent ; elle le porta
dans une fente de rocher. Ensuite elle attendit. Elle en fut bien punie. Un jour qu’elle passa près
du rocher elle y trouva un grand serpent, un dragon, qui sortait de la fente où
elle l’avait déposée quand il était petit. Elle prit peur et s’enfuit. Le
serpent la suit et, la nuit , il fait le tour du douar , les chiens aboient ,
la femme se lève et fait lever son mari . Il lui dit ‘’Qu’y a-t-il ?’’
Elle répondit ‘’Un grand serpent vient dans notre douar pour tout dévorer ‘’ .
L’homme se lève, il selle sa jument ; la femme lui dit ‘’J’irai avec toi,
moi et les enfants.’’ Il monte sur sa jument
et se rend à Ilfen. Là était Bourch vieillard aveugle. Ils crient, les
serviteurs de Bourch accourent: ''Qu’y a-t-il ?’’ ‘’ Un dragon dévore notre
douar ‘’. On va au dragon ; on le trouve en effet qui dévorait le
douar. On le chasse au sommet du Kef. On jette sur lui de grandes pierres et
des arbres, jusqu’à ce qu’on le couvre. On allume du feu ; la flamme s’élève
jusqu’au ciel. Le serpent se fond et une graisse épaisse coule du bûcher. C’était
un jour d’été. Les abeilles viennent
butiner cette graisse et en font du miel. Lorsque le moment est venu de couper
les ruches, on récolte beaucoup de miel. On l’entasse dans de paniers ;
mais les gens n’en mangent pas. Ils craignent de mourir. Puis ils prennent la
résolution d’en faire manger Bourch disant ‘’Donnons-le à Bourch qui est vieux
et aveugle, s’il meurt peu importe.’’ Ils lui en donnent un peu.Il le mange, il
se frotte les yeux ; il voit. Il dit ‘’Ajoutez un peu’’ .Ils lui en
donnent un grand morceau, il mange, il se frotte les yeux, il est guéri. Aïcha
Tabahloult lui dit ‘’Ils ont voulu te faire mourir.’’Il lui répondit : ‘’Fais
lever mes fils, qu’ils viennent.’’ Les fils arrivent. Le père leur dit :’’Je
ne demande pas la Diya (prix du sang), donnez-moi Aïcha.’’ Ils lui disent :’’Volontiers’’.
Ils la lui donnèrent et elle enfanta de nombreux enfants dont la descendance
constitua les tribus qui peuplent aujourd’hui l’Aurès’’.
Chaque grand village du nord de l’Aurès avait ses propres
versions de la même histoire.
A Tagoust , le vieux bourch se voyait attribuer trois femmes
, Touba (mère des Touaba , Aïth Daoudh) , Aba ( mère des Aïth Abdhi ) , Aïcha
Tabahloult (mère des gens de Nara et de Menaâ) .
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