mercredi 18 janvier 2012

Le Yennar chaoui, une fête qui défie le temps

Femme chaouie cuisinant
Il y a quelque jours les chaouis ont célébré à l’instar des autres peuples amazighs le ‘’Yennar ‘’, le jour de l’an amazigh ( ixef n-ussugès, ou Amenzu n-Yennar ) , ainsi on est entré en l’an 2962 de l’ère amazighe .
Le Yennar (Yennayer  dans d’autres régions amazighes)  coïncide avec le 12 janvier du calendrier grégorien, il marque le premier jour du calendrier agraire chez les berbères qui sont  très liés à la nature et des cycles de végétation,  régis par la succession des saisons  du fait  du  régime de leur  vie qui est étroitement lié à la terre.
‘’Yennar’’ cette importante fête amazighe célébrée presque dans toute l’Algérie semble perdre chaque année de son importance, dans l’Aurès où elle a pourtant rythmé la vie des chaouis depuis des millénaires, elle a perdu aujourd’hui  de son éclat et plusieurs des rites qui l'accompagnaient    sont tombé en désuétude surtout dans les milieux citadins du pays chaoui , où   de plus en plus de jeunes ignorent presque tout de cette importante fête .
Pourtant dans plusieurs régions de l'Aurès les rites entourant la fête de Yennar demeurent  à ce jour intacts, ils sont observés avec la même rigueur depuis des siècles, ces rites divers et complexes  à grande teneur symbolique   demeurent  à ce jour peu  explorés     faute  de spécialistes dans le domaine.
Pour les chaoui le jour du Yennar était un repère chronologique important dont dépends toutes les activités agricoles qui rythme la vie du chaoui , tous les travaux agricoles doivent être terminés sinon interrompu ( cueillette d’olive par exemple) , les métiers à tisser doivent impérativement être enlevés ,  la journée du  12 est appelée ‘’Yennar aqdhim’’ ( Yennar l’ancien) , et celui du 13  Yennar ajdidh ( le nouveau yennar) .

Yennar aqdhim : on considère la journée du 12 comme le dernier jour de l’année qui s’achève (d’où le nom yennar l’ancien), le repas doit être préparé à base d’anciens ingrédients,  le met le plus populaire est ‘’ lɛich’’ préparé avec de la viande séchée (qu’on a salée et gardée à cet effet depuis longtemps) , tous les membres de la famille
Tassirth
 doivent être réunis autour du repas et ne doivent pas se lever avant qu’ils soient rassasiés pour conjurer la famine de l’année qui se profile .
Yennar ajdidh ( Athrer) : la journée ( du 13 )  commence par le nettoyage et l’embellissement de la maison la même chose pour l’étable et la cour , les caches des céréales ( Tisserfin ) , on renouvelle  le contenu des sacs à grains ( tachluth) de semoule , riz , fève …. , les vielles femmes de la maison ( Timgharin) procèdent aux changement des pierre de l’âtre ( inguen n-ilmassi) cette action revêt une importance capitale pour les chaouis et dont l’exécution se fait en respectant minutieusement une cérémonie préétablie .
Ensuite la vielle femme cueille  une plante spécifique ‘’ Adheryis’’ et la ponde au seuil de la maison afin  d‘empêcher les  mauvais esprits d’entrer et chasser le mauvais œil, il n’est pas superflu d’embaumer le verger de plante aromatiques pour le prémunir aussi de ces maléfiques puissances invisibles.

La  femme ( souvent la grand-mère ) prends les deux pierres de l’âtre  ( on laissant celui de droite, ing afussi ) dans un sac ( taklut) et sort accompagnée des enfants de la maison , la grand-mère  en choisissant les nouvelles pierres se livre à une sorte de
La femme chaouie ne se contente pas des travaux domestiques
lecture et d’interprétation des signes et des présages , par exemple si elle soulève une pierre et qu’elle trouve en dessous   un mille pattes la vielle sage en conclue que le bétail va s’accroitre , un insecte augure d’une bonne année agricole …. Etc.
La ménagère après avoir changé  les ustensiles de cuisine usagés, renouvelé   le balai traditionnel ( tafarrat ) , elle prépare iɛnen n-yennar  ( petites galettes) en quantité importante en sorte que chaque membres de la famille ,  proche , voisin ainsi que chaque objet aura son ‘’ taɛnunt’’ , la meule traditionnelle (Tassirt) , le métier à tisser ( Azzeta) , le foyer du feu ( ilmassi) auront leur galette  ….etc.  (et  même le chat n’est pas en reste) , le père de famille sur sa mule suivi des enfants  tout joyeux et contents parcoure les environs pour donner à chaque voisins sa petite galette , ‘’ iɛnen n-yennar’’ reçus rentre dans la préparation du ‘’Zirawi ‘’ qu’on mange avec le ‘’Achexchux’’  au déjeuner .
Amensi n-yennar ajdidh ( le diner de yennar ) est le point culminant de cette fête , toute la famille se ressemble dans la maison de l’aïeul , du grand père ou du fils ainé autour du couscous au dinde ( le dindon doit remplir certaines conditions ,  taille , couleur du plumage …etc.),  on mange copieusement et on dispose des cuillères des absents .

Les rites de Yennar reflètent  le foisonnement des croyances et des superstitions des chaouis qui ont survécus  à des siècles d’oralité, lesquelles doivent aujourd’hui faire l’objet   d’études de la part des spécialistes et d’intérêt accru  de la part de tous les chaouis afin de les préserver contre l'oublie  et de  les perpétuer.

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